24 févr. 2009

The New Fragrance


Les mains sur le lavabo, les yeux dans la glace, elle s’amuse à défier son reflet en tee-shirt/ culotte. Qui lâchera le premier ? Les pupilles dilatées à l’excès, le regard agrandi sur un mystère oublié, le silence assourdissant, le sachet qui manque tomber à l’eau… Un homme dort sur le divan déplié, on dit de lui que c’est SON homme. Et elle s’éloigne. Lui s’inquiète, l’embrasse, la caresse, de plus en plus doucement, de plus en plus furtivement, comme s’il avait peur de la blesser, de la casser, ou de pénétrer ce mystère qu’il sait ne pas être le sien. Elle reste, parce qu’elle l’aime au fond, parce qu’elle veut mourir dans les bras d’un homme. Il reste, parce qu’il l’aime, parce que la drogue la rend vulnérable et qu’il se croit fort. Elle bouge le bras et un tatouage apparaît dans le miroir, sous l’aisselle. Le dessin demande une cigarette qu’elle va chercher dans les poches de l’homme endormi. Le reflet fume maintenant, une salamandre sur le bras. Ayo et un Gin plus tard, elle suce son doigt. La main glisse le long des cuisses et l’index triture les lèvres. Son clitoris durcit et rougit sous la caresse, le reflet se cambre et gémit. Haletante, elle s’observe s’oublier. Les doigts l’ont pénétrée, l’œil hagard fixe la bouche râler. La fille se branle. Sous le néon, la peau blanchit, morbide. Les petits seins se balancent en trémolo au-dessus du lavabo, la bouche fait buée dans la glace, et le regard se perd dans son double, allongé sur le meuble. Le bras disparaît entre les jambes, le nez tombe dans la poudre, les lèvres frémissent encore. La libido s’exacerbe quand l’espoir s’anéantit. Tant bien que mal, elle part éteindre la radio. Le grincement de sa mâchoire emplit la pièce d’une musicalité sournoise. Face à l’homme étendu, elle se redresse, droite et fière, maintenant qu’elle ne peut plus ni dormir ni se taire ni pleurer. C’est le bruit du verre brisé qui le réveille, en sursaut. Elle n’aura pu garder cette position de dernière conquérante. Avachie contre le mur, la tête couchée sur l’épaule, elle fixe toujours, ailleurs, un reflet d’elle-même, inexistant. Le verre s’est logé dans la paume et le sang se mêle à l’alcool répandu. Il glisse aussi sur les lèvres, emporte la poudre qui s’agrippait aux narines.
Dans l’obscurité, le grincement de la mâchoire a repris, rassurant l’homme sous les couvertures, pour quelques instants seulement.

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