2 août 2010

L’ascenseur


Une maison à deux étages. Une vie sur trois niveaux.
Au rez-de-chaussée, un homme fait semblant de dormir, inconfortablement installé le cul entre deux chaises. Il ronfle sans rêver. Il ronfle en pensant consciencieusement. La nuit est là mais ne l’emporte pas. Le sillon du réverbère trace son chemin jusqu’à lui sans sembler le déranger.
Au premier, une jeune femme rumine une année de gâchis. Etalée dans le lit conjugal, elle possède l’espace pour signifier qu’elle n’a que faire de tout ce cinéma. C’est faux évidemment. Elle ouvre régulièrement un œil et compte les néons des voitures qui passent au-dehors. Elle soupire plus souvent encore, fâchée d’entendre le rez-de-chaussée si animé.
Au dernier, la dernière. Un petit bout pas plus grand qu’une cuisse qu’aiment les deux autres niveaux. Elle seule dort en cette heure avancée. Elle seule sera victime de l’indifférence qui règne.
Les deux adultes ont alors un esprit gamin. Chacun passe subitement du premier au deuxième, du deuxième au premier, parfois au rez-de-chaussée. C’est nul.
Hier, ils ont fait l’amour trois fois. Ce soir, aucune. Ils n’ont pas fini de gueuler leur différence et ceci empêche le sommeil de s’installer. A 1h30, enfin, elle écrit sa vie, lui respire plus bruyamment qu’au début. La nuit les emportera tard, épuisés, torturés.

Et le combat silencieux reprendra demain dans les larmes et les cris.