23 déc. 2008

Le blablabla d'une vallée


Dominique Lefort

De nouveaux talons pour l'occasion, une robe aussi sérieuse que fatale, et seulement Rien pour dessous ; les fêtes de fin d'année ! Ils avaient du choisir entre plusieurs invitations pour le très classique rituel du dîner entre couples, champ' et petits fours. Pourtant, elle aurait volontiers répondu à la très débridée mais non moins imbattable partie de pocker que plusieurs de leurs potes sans "e" concoctaient cette année encore. Sa soeur l'avait trop pressée de rentrer dans le rang et elle s'y trouvait plutôt mal à l'aise. Les femmes parlaient bébé et chiffon dans la cuisine tandis que les hommes, entassés dans les rares fauteuils, s'ingéniaient déjà à finir les bouteilles de digestif. Deux minutes plus tard et elle les rejoignait avant de passer sur le balcon, prendre l'air. Encore agacée d'avoir accepté cette grotesque mise en scène, elle pensa à entraîner Charlotte dans une danse frénétique, à se trémousser sur la table basse, à piquer les chaussettes de Georges, et à se suspendre à la cravate d'Edouard.
A taaaaable !
Ainsi, ils étaient deux maintenant, et, aux yeux de beaucoup, plus qu'un seul et même concept. Comme s'il avait trouvé la chose tout aussi barbante, il s'accouda à la balustrade, et, en soupirant de concert, ils se communiquèrent leur fou rire. Deux blagues salaces et trois verres d'apéro plus tard, ils étaient sagement assis l'un en face de l'autre, une sorte d'escargot de pâte et de viande hachée dans l'assiette, une boule de glace dans une coupe. Elle était grise, contrairement à ses compagnes qui enfanteraient sous peu ou allaitaient déjà et qui la suivaient au jus d'ananas. Encore une fois, elle voulait rire et, pour se retenir, chercha des doigts le genoux de sa moitié, concentré à suivre le monologue de son voisin de droite.
Une serviette tombe, une main cherche, une bouche trouve, une femme sous la table.
Personne ne semblait avoir remarqué le petit manège et le fou rire reprit donc, rouges d'excitation, ébouriffés qu'ils étaient. Non, elle ne se sentait pas mal. Oui, elle avait les doigts de son Jules dans son sexe pendant qu'il faisait mine de chercher l'heure dans sa veste. Et non, ça, elle ne pouvait pas le dire. Avant le traditionnel feu d'artifice du quartier, ils étaient repartis, bourrés, enchantés de ce début d'année. Maintenant, ils allaient prendre de bonnes résolutions ...

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